150 choristes : J'envisage de créer un visuel comparable au cœur d'une chorale entonnant soudainement une
ouverture musicale puissante en accueillant le visiteur.
Mon projet est de réaliser un polyptyque de 150 tableaux (quantité en référence aux années anniversaires de
l'événement). C'est un ensemble qui partitionne la toile de 4,5 m. x 2 m. selon une grille de cinq alignements
sur la hauteur par trente colonnes sur la longueur (5 x 30 = 150). La division en cinq représente les cinq
continents (universalisme), les cinq doigts d'une main (humanisme), ou selon certaines traditions, le souffle
de vie et l'union. La division en trente symbolise la sagesse et l'ouverture, l'optimisme, l'encouragement, l'avenir
prometteur (avenir à construire).
Chacune des peintures ajustent sur leurs hauteurs une figure humaine en position debout (posture de la dignité).
L'écriture métaphorique choisie est une transposition variable, le plus souvent éloignée de la figuration. Ces
150 personnages représentent la diversité des origines et des traditions humaines, diversité de pays, de croyances,
de peuples premiers. Cette distribution respecte une parité homme/femme, jeune/âgé, classe
aisée/classe sociale pauvre, de costume traditionnel ou contemporain. La gestuelle et l'expression des
personnages les montreront parlant ou chantant, en laissant imaginer ce qu'ils ont d’urgent à nous dire.
Mes propositions d’applications et de matériaux sont de faire écho à la diversité des origines et des cultures
en agissant avec divers techniques historiques, en donnant plus d’importance à la qualité respectueuse des
processus qu’au résultat pictural. Les 150 rectangles sont monochromes ou en camaïeux, chacuns peints avec
la dominante d'un pigment ou d'une teinture différents, soit une collection de 150 couleurs du monde entier
(commandes chez Ôkhra, Leroux, Kremer ...). La couleur ne peut se restreindre en une quadrichromie de tons
primaires et prend de la force avec la qualité inimitable des origines pigmentaires. La “peinture-peinture” –
encollage de poussières comparable à la plasticité de l'argile – est une proche parente de la “matière humaine”.
J'espère obtenir une unité malgré une saturation de richesses, poussant à leurs limites les instruments plastiques
afin d'exprimer la complexité du monde et d'annoncer tous les échanges qui vont résonner au cours de cet
évènement. Mon ambition la plus forte est de mettre en corrélation chacune des images les unes par rapport
aux autres par un travail éprouvant du dessin : une volonté d'unité dans les fondations même de la réalisation.
L'effort et l'énergie manifestés pour faire naître cette toile serait en elle-même une performance, j'espère, à la
mesure du sujet. Un rapport interne écrit ou filmé en atelier de l’élaboration reste envisageable.
Le support est une toile de lin décatie d'un seul tenant enduite à la colle de peau de lapin (encollage traditionnel
dit universel, accueillant sans problème tout type de peinture et conservant une sûreté de souplesse). Je propose
que cette toile soit marouflée au dos sur une série de contreplaqués de 3 ou 4 mm. d'épaisseurs (contreplaqués
marouflées recto-verso de toiles pour stabiliser la planéité). Des intervalles de toiles sans collage de bois
permettront un pliage (en accordéon) pour le transport (volet = 2 m. x 0,15 m.). L'avantage de cet assemblage
est aussi de rigidifier chacune des peintures et d’y appliquer une liberté de médiums selon les pigments : huile,
acrylique (avec collages de tissages ou autres), gomme arabique (aquarelle et encre), encaustique à la cire,
enduit de fresque, tempéra à l'œuf et feuilles d’or, ouvrages artisanaux comme le cuivre ou le cuir ...
Option 1 : Je souhaite avancer une option possible en donnant une légère ondulation aux colonnes verticales.
L'aspect évoquera le dépliage d'une grande carte (universalisme). L'encombrement total respectera les
dimensions demandées mais la longueur est augmentée pour permettre la mise en place de plis verticaux.
Aussi, cette disposition brisera les lignes horizontales, donnera de la perspective et du "mouvement"
L'enchaînement des personnages s'animera avec le déplacement du regardant. Je préconise pour cet accrochage
de fournir une barre haute et une autre pour le bas de l'œuvre, permettant de guider l'ensemble des volets par
l'arrière, avec une découpe “en crémaillère”.
Option 2 : Que deviendra cette commande une fois l'événement terminé ? Mon projet laisse une possibilité
qui vous appartient, celle de découper la toile en 150 tableaux, soit pour les offrir, soit pour confier le tout à
une maison de vente experte. Les enchères pourraient aisément transformer cet investissement en un budget
augmenté pour une donation humanitaire (12 000 divisé par 150 égal la somme minimum de 80 pour
prix de réserve par tableaux – avec une enchère moyenne de 300 la donation s’élèverait à 45 000 ...).
Philosophie : La mythologie de notre époque est de supposer l’homme capable de faire table rase et de
s’affranchir des conditionnements du cadre où s’exercent ses pensées. Pourquoi sortir de la prison de nos esprits
pour rentrer dans une autre tout aussi sclérosante ? Demain se réalisera, naturellement, respectueusement,
lentement. Instaurer l'égalité ne consiste pas en un nivellement des êtres et la paix ne se gagnera pas avec
l'abandon de nos différences mais avec la richesse de nos différences. L'uniformité est sans amour, c'est une
idée totalitaire.
Yves Calméjane, Condat le 10. 11. 2021
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