• Réf 077


Les herbes rouges
Huiles sur cartons à la colle de peau – 29 x 20 cm. de h.
Calvi, Corse 30 juillet 2008

non disponible
(Destination : Clermont 2019)
Vendu par La Chrysomèle, galerie d'art

Tableau original peint in situ sur le motif


colle de peau

Support :

Sur carton, gesso à la colle de peau pour l'impression.


Couleurs :

Couleurs en tubes Leroux. Broyage à la molette de pigments avec l'huile de lin en atelier.

Encadrement :

Passe-partout en contre-plaqué encadré baguette simple.

En exposition à la Galerie Le Miroir du temps en 2018
Adrienne Dauprat

HERBES ROUGES

Rouge !
C’est ma couleur préférée !
Et vous ? Non. Je ne veux pas le savoir.
J’aime le paysage qui m’accueille chaque jour lorsque j’ouvre les yeux, quand je les plonge de l’autre côté de la vitre de la chambre. Pourtant, je trouvais qu’il lui manquait quelque chose, à ce paysage. Longtemps, je n’ai pas su quoi. Puis un beau matin, j’ai compris. Il n’y avait pas de Rouge ! Aucune trace !
Alors je me suis dit : « Au travail ! Sors tes pinceaux, tes couleurs ! »
Je me suis assis devant les brins d’herbe verts. Ils resplendissaient de vie en plein midi.
« Non ! Ne te sers pas de ce que va vomir ton tube de peinture ! Réfléchis, il faut trouver Le Rouge ! »
Je suis rentré et j’ai sorti mes cornues et mes alambics et je me suis assis devant. Ils portaient les traces d’une poussière tenace.
Je me suis gratté la tête. Par où commencer ? Il me fallait un rouge qui ne tue pas ! En un mot, un rouge magique, un rouge vivant, un rouge calme.
Je suis retourné devant les herbes. « Mère Terre, aide-moi ! »
J’ai posé mes deux mains bien à plat sur le sol. Des petits cailloux vibraient sous mes paumes. Des ondes chaudes ont remonté le long de mes bras et ont pénétré dans ma tête.
Et, j’ai su !
Il me fallait la pourpre des murex, le ponceau de l’hématite, le carmin de la cochenille et l’incarnat du ciel quand le soleil rejoint les antipodes.
J’ai enfilé un barbour fatigué, fourré dans ma poche mon vieux carré d’étoffe et emporté un havresac où sommeillent toujours quelques brimborions.
Je suis parti. Je n’ai même pas fermé la porte.
Et je suis revenu.
La porte était toujours ouverte.
Mon sac était lourd du poids des coquillages et des pierres. Mon sac était léger de l’essence des insectes et du firmament.
J’ai enlevé le bout de tissu qui couvrait mon crâne et me suis mis au travail.
Je n’ai pas fermé la porte. Les arbres et les collines ont surveillé mon labeur.
Par un beau petit matin, je me suis assis devant les herbes vertes. Elles m’attendaient, j’en suis sûr !
Dans ma cornue la plus joufflue vivait le plus beau des rouges. Il était né goutte à goutte de mon alambic le plus psychédélique. Mon Rouge, pas le rouge du sang qui inonde les champs de bataille. Pas le rouge de la colère qui rend fou. Un rouge changeant, sans cesse en mouvement. Un rouge de chaleur douce.
Je me suis assis et j’ai peint tous les brins, un à un. Le vent se glissait entre mes mains, entre mes doigts. Le vent séchait la couleur. La terre murmurait sous mes fesses. Chacun des brins est différent : magenta, corail, garance, framboise, Rouge, Rouge, Rouge à jamais !
Ils sont là, posés devant les arbres. Ils sont là, posés devant les collines.
Je peux maintenant me retirer… sur la pointe de mes pinceaux…
Et vous laissez regarder !

Adrienne Dauprat

 


 


Calméjane Yves
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